Affaire Seni: un agriculteur chassé de ses terres

Publié le par FPL

[Corse-Matin] Une merendella pour la famille Seni

http://www.corsicalibera.com/wp-content/uploads/2010/04/merendella-coghja.jpg


Au bout d’un chemin en terre jalonné d’une mer de deux cents oliviers, une vue imprenable sur le golfe de Sagone. Il est 12 h 30 et déjà une trentaine de personnes s’affaire, tout en discutant, à la préparation d’une merendella de soutien. Sur le plateau de Rovani, l’atmosphère de ce lundi de Pâques est digne mais lourde de sens pour Jean-Michel Seni et sa famille. « Mercredi prochain (le 14 avril), le tribunal d’Ajaccio rendra son délibéré, glisse l’agriculteur de 45 ans, qui avoue être passé « par tous les stades » ces dernières années. « Je suis moralement et physiquement épuisé, concède-t-il. J’essaye de garder espoir, mais je ne sais plus trop à quoi m’attendre. »


Il est vrai que l’affaire dure depuis près de quatre ans. À l’origine, Patrice Scatena, enseignant d’éducation physique à Mayotte, vient passer ses vacances à Coggia, où il possède une maison. Il est ami avec la famille Seni qui exploite ses terres au lieu-dit Rovani. Mais cette exploitation – d’environ 150 hectares – ne leur appartient pas en propre. Les terres sont en fait en indivision. Au moment de la liquidation de la succession, en 2006, une vente aux enchères est décidée. La famille Seni réussit à réunir la somme de 220 000 €. Mais Patrice Scatena surenchérit et acquiert in fine la propriété pour la somme de 350 000 €. Depuis (dans la mesure où une partie de ces terres est constructible), le nouveau propriétaire n’aurait de cesse de faire expulser l’exploitant agricole.


« C’est ma vie »


Au départ, cependant, il s’agissait d’un problème d’indivision classique, qui a « très mal tourné » et ne « manquera pas de se reproduire », assure Brigitte Artily, membre du collectif et de l’exécutif de Corsica Libera. À ses côtés, Jean-Toussaint Poli, maire d’Ambiegna, venu lui aussi apporter son soutien, estime qu’on « privilégie le tourisme plutôt que l’agriculture ».


Un avis partagé par Jean-Yves Torre, du réseau Droits paysans, présent aux côtés de la famille Seni depuis le début de ce « combat ». Il estimait que dans ce cas de figure précis, « la Safer aurait dû user de son droit de préemption. Quant aux politiques, ils parlent d’économie rurale et de désertification et ils font exactement le contraire, s’emporte-t-il. Ils sont en passe de foutre en l’air une famille. Comment peut-on laisser faire ça ? »


« C’est difficile à expliquer », glisse Jean-Michel Seni, alors qu’il procède à la visite de son moulin. Les yeux embués, il lâche alors sans ambages : « Si mon père et mes aïeux voyaient ça, ils se retourneraient dans leurs tombes. Je ne revendique rien. Simplement le droit de conserver l’exploitation familiale. J’y suis né, j’y ai toujours vécu et travaillé. C’est ma vie… »

É.c.


Source Corsica libera

Publié dans Corsica

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article